Le procès de l’ancien président sud-africain Jacob Zuma, dans une affaire de pots-de-vins vieille de plus de 20 ans, a repris lundi lors d’une audience virtuelle, après plus d’une semaine d’émeutes qui ont ébranlé le pays.
Le détonateur de ces violences, qui ont commencé le 9 juillet, avait été l’incarcération de M. Zuma, 79 ans, dans une affaire distincte où il a été condamné pour outrage à la justice.Pillages et incendies, concentrés d’abord en pays zoulou (est) s’étaient étendus à Johannesburg, la plus grande ville et le poumon économique du pays.
Lundi matin, soldats et policiers étaient positionnés en nombre dans Pietermaritzburg, la capitale de la province du Kwazulu-Natal (est), où est situé le tribunal, un hélicoptère survolant aussi la zone, selon l’AFP sur place.Pourtant, l’audience se tenait uniquement en ligne.
M. Zuma, costume sombre et cravate rouge, est apparu à l’écran depuis sa prison d’Estcourt, à moins d’une centaine de km.Le procès, comme souvent en Afrique du Sud, était télévisé.
Les partisans de M. Zuma, dans cette région dont il est originaire, se rassemblent généralement à chacun de ses déplacements pour soutenir leur champion.Ils sont accusés d’avoir fomenté le chaos des derniers jours, que le président Cyril Ramaphosa a qualifié de tentative orchestrée de déstabiliser le pays.
Le procès reprend virtuellement pour éviter davantage de « perturbations », avait expliqué à l’AFP le parquet général, alors que d’autres affaires sont entendues en ligne ces dernières semaines en raison de la pandémie.
L’avocat de M. Zuma, Dali Mpofu, a contesté la virtualité de l’audience, arguant que cela violait les droits constitutionnels de son client.Notamment parce que cela l’empêche de consulter son équipe de défense pendant l’audience.
Il a expliqué que les troubles de ces derniers jours étaient « imprévus » et demandé au juge Piet Koen un report du procès de « deux ou trois semaines ».
– « Conditions plus sereines » –
M. Zuma doit répondre de seize chefs d’accusation de fraude, corruption et racket liés à l’achat, en 1999, de matériel militaire auprès de cinq sociétés d’armement européennes, alors qu’il était vice-président.
Il est accusé d’avoir empoché plus de quatre millions de rands (soit 235.000 euros au taux actuel), notamment du groupe français Thales qui était une des entreprises attributaires du juteux contrat d’une valeur globale d’environ 2,8 milliards d’euros.
Le géant français de la défense est également poursuivi pour corruption et blanchiment.M. Zuma, comme Thales, ont toujours nié ces accusations.
La fondation de M. Zuma avait déjà réclamé samedi une audience physique ou un report du procès quand les conditions dans le pays seront plus sereines ».
M. Zuma, en dépit de nombreux scandales de corruption qui ont entaché sa présidence, conserve une réelle influence, y compris au sein de l’ANC, le parti historique au pouvoir.
Ce procès a déjà été plusieurs fois reporté, l’ex-président multipliant les recours.Lors de la précédente audience en mai, M. Zuma avait plaidé non coupable, avant que les débats ne soient rapidement ajournés.
Ses avocats réclament aussi la récusation de l’avocat du ministère public, Billy Downer, l’accusant de partialité et d’avoir divulgué des éléments du dossier à la presse. De son côté, Me Downer accuse les avocats de Zuma de tenter, encore une fois, de retarder la procédure.
L’accusation prévoit de citer plus de 200 témoins lors du procès.
M. Zuma avait été contraint en 2018 à la démission après la révélation d’une série accablante de scandales.Deux ans plus tôt, un rapport au fort retentissement détaillait notamment comment une fratrie d’hommes d’affaires d’origine indienne, les Gupta, avait pillé les ressources publiques sous sa présidence (2009-2018).
AFP