Une figure de l’opposition en Ethiopie, inculpé notamment de terrorisme et incarcéré, risque des « problèmes de santé permanents » après plus d’une semaine de grève de la faim, a affirmé son avocat vendredi à l’AFP.
Jawar Mohamed, membre du Congrès fédéraliste oromo, figure parmi la vingtaine de personnes poursuivies pour terrorisme et d’autres infractions, en lien avec les violences dans la région de l’Oromia, qui ont fait environ 200 morts en juin et juillet, victimes de la répression policières ou d’affrontements intercommunautaires.
Les violences ont été déclenchées par l’assassinat par balles d’Hachalu Hundessa, un populaire chanteur devenu un porte-drapeau de sa communauté oromo, la plus importante en nombre du pays, un meurtre qui a exacerbé le sentiment de marginalisation politique et économique de la jeunesse locale.
M. Jawar est en grève de la faim depuis huit jours, comme Bekele Gerba, autre responsable de l’opposition oromo, tandis que d’autres accusés « en sont à leur sixième jour désormais », a déclaré à l’AFP son avocat, Tuli Bayyisa.
Ils réclament notamment une amélioration du traitement réservé à leurs proches et partisans leur rendant visite et, plus largement, que soit mis fin au harcèlement, notamment judiciaire, contre les responsables oromo d’opposition, selon M. Tuli.
« Ils ont dit +c’est la seule option que nous avons, tant que nous sommes en prison. C’est la seule manière de montrer notre résistance pacifique à ce qui se passe dans pays+ », a poursuivi l’avocat.
Jeudi, les accusés ont comparu devant un tribunal mais étaient trop faibles pour se tenir debout, a-t-il affirmé. « Ils étaient très, très faibles (…) Leurs médecins (…) ont dit que leur état de santé est désormais dans une situation critique. Si la situation reste en l’état, ils risquent des problèmes de santé permanents ».
La Commission éthiopienne des Droits humains (EHRC), institution publique indépendante, a indiqué avoir visité les accusés vendredi à Addis Abeba et a confirmé la réalité de leur grève de la faim.
« Une surveillance très étroite est nécessaire pour prévenir toute menace grave sur leur santé et leur vie », a déclaré le chef de l’EHRC, Daniel Bekele, ajoutant que « les demandes raisonnablement justifiées des détenus devaient être satisfaites ».
Un temps considéré comme un allié du Premier ministre Abiy Ahmed – premier Oromo à occuper cette fonction en Ethiopie – Jawar Mohammed, ancien magnat des médias, est devenu l’un de ses plus farouches détracteurs.
Après avoir relayé grâce à sa chaîne l’Oromia Media Network (OMN) le mouvement de contestation né en Oromia contre l’élite tigréenne au pouvoir, qui finira par porter à la tête du gouvernement M. Abiy en 2018, il accuse désormais celui-ci d’être un piètre défenseur des intérêts de la communauté oromo et de se comporter en dictateur.
AFP