Un troisième foyer jihadiste pourrait naître dans le sud-ouest du Niger, théâtre d’un banditisme violent venu du Nigeria voisin et de tensions communautaires, que pourraient exploiter les groupes jihadistes pour asseoir leur influence dans cette zone, a estimé jeudi le centre de réflexion International crisis Group (ICG).
Le Niger fait déjà face à deux fronts jihadistes: dans sa partie est proche du Nigeria avec le groupe jihadiste nigérian Boko Haram et Etat islamique en Afrique de l’Ouest (Iswap), sa branche dissidente, et dans sa partie ouest proche du Mali avec les groupes affiliés à l’Etat islamique (EI) et à Al-Qaïda.
Dans le sud-ouest, « à la frontière entre le Niger et le Nigeria, le grand banditisme s’intensifie et se transforme de manière inquiétante, laissant présager l’apparition de situations insurrectionnelles dont pourraient profiter des groupes jihadistes en quête de nouveaux territoires », selon un rapport de l’ICG.
Il souligne que la violence exercée par ces gangs armés concentrés dans les Etats du nord du Nigeria, s’est exportée au cours des dix dernières années dans les régions nigériennes de Maradi (centre-sud) qui jouxte l’Etat fédéré nigérian de Zamfara et de Dogondoutchi (région de Dosso), frontalière de Sokoto, autre Etat fédéré du Nigeria.
La propagation du banditisme « renforce la méfiance entre les communautés » et « menace la cohésion sociale » dans cet espace jusqu’ici épargné par les sanglantes attaques jihadistes au Niger, constate le rapport. »Pour se protéger du banditisme, des groupes d’autodéfense (…) sont en cours de formation dans la région de Maradi.
Exclus de ces groupes et suspectés d’être à l’origine des violences armées, les pasteurs (éleveurs) sont poussés à se rapprocher des groupes de bandits pour y trouver une forme de protection », selon ICG.
« Les tensions locales sont souvent exploitées par les groupes jihadistes » et « leur enracinement pourrait ouvrir un nouveau front de violence pour le Niger et menacer d’encerclement Niamey ».
En août 2020, l’assassinat par l’Etat islamique au Grand Sahara (EIGS) de huit civils, dont six humanitaires français, à Kouré, à 60 km à l’est de Niamey, « illustre la progression rapide des jihadistes vers le sud-ouest du pays », selon l’ICG. Et, récemment, des attaques contre des forces de défense et de sécurité du Niger et du Nigeria « suggèrent une connexion croissante entre les gangs frontaliers et les groupes jihadistes nigérians ».
En 2018, Niamey a renforcé les patrouilles militaires le long de la frontière avec le Nigeria pour empêcher les incursions des bandes armées qui procèdent à des assassinats ciblés, à des enlèvements contre rançon, des attaques des commerçants et des razzias de bétail qu’ils conduisent au Nigeria.
Selon le Haut Commissariat de l’ONU aux réfugiés, la région de Maradi accueille près de 100.000 personnes déplacées, dont 77.000 réfugiés nigérians, qui ont fui les attaques incessantes dans les Etats de Katsina, Sokoto et Zamfara, tous situés dans le nord-ouest du Nigeria.
AFP