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Soudan : difficile recouvrement des biens mal acquis de l’ex-président Béchir

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Les autorités de transition soudanaises sont engagées dans le recouvrement des biens mal acquis de l’ex-président Omar al-Béchir et de son entourage, mais beaucoup de ces avoirs volés seront difficiles à récupérer, estiment les experts.

“Les premières estimations indiquent que la valeur des biens fonciers et immobiliers illégalement acquis par les hommes de l’ancien régime oscille entre 3,5 et 4 millions de dollars” (3,1 à 3,6 millions d’euros), a estimé Salah Manaa, porte-parole du comité de lutte contre la corruption, qui a entamé ses travaux en décembre.

“Ce n’est que la partie émergée de l’iceberg”, a-t-il précisé en ajoutant que le comité, qui travaille sous la houlette du gouvernement militaro-civil mis en place en août 2019, n’avait “pas encore pu mettre la main sur les liquidités”.

La corruption du régime (de Béchir) était très étendue et variée (…), une partie a été dissimulée avec habileté

Arrivé au pouvoir en 1989 après un coup d’Etat, Omar el-Béchir a été déposé par l’armée en avril 2019, après quatre mois de manifestations populaires déclenchées par une mesure de triplement du prix du pain.

Condamné en décembre à deux ans d’emprisonnement pour corruption, l’ancien autocrate est aujourd’hui détenu dans la prison de Kober, à Khartoum.

Selon une source proche du dossier, le comité anticorruption a reçu “une grande quantité de documents transférés dans trois camions”, qui seront “scrupuleusement étudiés”.

Depuis sa création, l’organe a saisi des hôtels, des centres commerciaux, des exploitations agricoles et des centaines de biens immobiliers mal acquis par l’ex-président et son entourage, dont ses anciens ministres des Affaires étrangères et de la Défense, Ali Karti et Abdelrahim Mohamed Hussein.

“Corruption étendue et variée”

Néanmoins, face à la difficulté d’estimer la valeur des avoirs détournés, le comité fera appel à des experts internationaux avant de les restituer à l’Etat, a précisé M. Manaa.

“La corruption du régime (de Béchir) était très étendue et variée (…), une partie a été dissimulée avec habileté”, ce qui complique la tâche des autorités de transition, juge Othmane Mirghani, rédacteur en chef du journal al-Tayyar et spécialiste de cette question.

Le recouvrement des biens va “requérir du temps et une grande expertise”, selon lui.

Principal angle mort de l’enquête, les liquidités déposées par les membres de l’ancien régime dans les banques du pays sont particulièrement difficiles d’accès.

“L’argent entreposé dans les banques est régi par des lois qui en interdisent l’accès à quiconque n’en est pas le déposant”, explique l‘économiste Mohamed al-Nayer, rappelant qu’il s’agit d’une législation répandue internationalement.

Si le volet bancaire patine, d’autres avoirs sont récupérables plus facilement, ce qui pourrait être bénéfique pour l‘économie soudanaise, à bout de souffle après 30 ans d’une gestion désastreuse.

“Quand ils seront détenus par l’Etat (…), les biens immobiliers pourront être mis aux enchères et les entreprises transformées en sociétés anonymes (…) ce qui engendrera de l’investissement”, selon l‘économiste.

Relancer une économie exsangue

Toutefois, cet horizon semble encore lointain et y arriver va “nécessiter du temps”, a-t-il nuancé, indiquant que la procédure de recouvrement est longue et implique plusieurs acteurs étatiques.

Malgré les espoirs suscités par la transition politique, Khartoum doit encore relancer une économie exsangue, qui pâtit toujours de la sécession en 2011 du Soudan du Sud, riche en pétrole, et de décennies de sanctions américaines.

Bien que Washington en ait levé une partie en 2017, le Soudan demeure sur la liste noire américaine des Etats soutenant le terrorisme, ce qui bride ses perspectives d’investissements.

Le manque de devises étrangères et le taux d’inflation, qui a atteint 99% en avril, entretiennent une crise économique durable.

Outre les accusations de corruption devant la justice soudanaise, M. Béchir est sous le coup de deux mandats d’arrêt de la Cour pénale internationale (CPI) pour “crimes de guerre”, “crimes contre l’humanité” et “génocide” au Darfour.

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