Les accusations américaines de crimes de guerre dans la région éthiopienne du Tigré sont « incendiaires » et « sélectives car elles répartissent iniquement les responsabilités parmi les parties » au conflit, a estimé mardi le ministère éthiopien des Affaires étrangères.
Lundi soir, le secrétaire d’Etat américain Antony Blinken, tout juste rentré d’Ethiopie, a affirmé que tous les belligérants – forces progouvernementales et rebelles – avaient commis des crimes de guerre durant les deux ans de conflit au Tigré, estimant que beaucoup de ces actes n’étaient pas « dus au hasard » ou à « une conséquence indirecte de la guerre » mais « étaient calculés et délibérés ».
Il a surtout pointé du doigt des crimes contre l’humanité attribués à l’armée fédérale éthiopienne et ses alliées (armée érythréenne et forces et milices de la région de l’Amhara) dont des « meurtres, viols et d’autres formes de violences sexuelles et de persécution », sans mentionner à ce sujet les forces des autorités rebelles du Tigré.
« Le gouvernement d’Ethiopie n’accepte pas les condamnations générales contenues dans cette déclaration (américaine) et ne voit aucun intérêt à une approche aussi unilatérale et antagoniste », répond mercredi le ministère éthiopien des Affaires étrangères dans un communiqué.
Cette déclaration « est sélective car elle répartit iniquement les responsabilités parmi les parties. Sans raison apparente », les Etats-Unis « semblent exonérer une des parties de certaines accusations de violations de droits humains, telles que viols ou violences sexuelles malgré des claires et accablantes preuves de sa culpabilité », poursuit-il.
« Alors que l’Ethiopie met en application le processus de paix, une telle répartition des responsabilités est injustifiée et amoindrit le soutien des Etats-Unis à un processus de paix inclusif en Ethiopie ».
Les propos de Washington sont en outre « inopportuns ». « Il va y avoir de plus amples investigations » sur les violations des droits humains durant ce conflit et cette déclaration « nuit aux efforts nationaux (éthiopiens) pour enquêter de façon exhaustive sur ces accusations, quelque soit les coupables », selon Addis Abeba.
La déclaration américaine est également « incendiaire » et « va être utilisée pour alimenter des campagnes (…) dressant les communautés les unes contre les autres » en Ethiopie, dénonce le ministère, critiquant une « approche partisane et source de discorde » « L’Ethiopie va continuer à mettre en place toutes les mesures visant à faire rendre des comptes aux responsables, y compris terminer la consultation nationale sur la justice transitionnelle et faire en sorte que justice soit rendue à toutes les victimes », assure le gouvernement éthiopien.
Un accord de paix, signé le 2 novembre 2022 à Pretoria a mis fin à deux ans de brutal conflit au Tigré, région du nord de l’Ethiopie. Contactées, les autorités rebelles tigréennes n’ont pas donné suite aux sollicitations de l’AFP.
AFP